Lorsque je suis entré en cinquième au collège d’Ambazac (87), mon professeur d’anglais, qui était une femme, m’a attribué une correspondante pour échanger des lettres en anglais. Cette correspondante japonaise s’appelait Masuko Maeda et habitait avec sa famille la ville de Kobé. Nos échanges au-delà de leur intérêt de pratiquer l’anglais et d’encourager à trouver dans le dictionnaire les mots encore inconnus nécessaires aux échanges, avaient l’intérêt de nous montrer les richesses respectives de nos civilisations, de nos modes de vie, de nos coutumes. C’était en 1960, nos pays semblaient tellement plus éloignés. Nos lettres sur papier ultraléger dans leurs enveloppes spéciales pour courrier par air, mettaient au moins une semaine pour parvenir à destination. Ces échanges avaient ce charme particulier et très personnel de l’écriture avec le stylo à encre. Les timbres étaient bien choisis pour exprimer sur leur surface réduite une caractéristique particulière de nos pays respectifs. Je me souviens des cerisiers japonais avec le Fujiyama en fond de paysage, des temples traditionnels et des fleurs qui semblaient porter leur subtil parfum. Les changements dans nos vies ont interrompu ces échanges conviviaux.
Je n’ai jamais oublié ma correspondante et j’ai encore plus pensé à elle lors du tremblement de terre de Kobé en 1995. Séisme de magnitude 7,2 qui fit d’énormes dégâts aux immeubles et provoqua de terribles incendies en rompant les canalisations de gaz, avec un bilan de 6000 morts et 300 000 sans-abri. Tout cela malgré la préparation particulière des Japonais qui se savent exposés aux séismes, malgré l’expertise des systèmes de secours.
La catastrophe de Kobé est dépassée par celle que vient de subir la côte est du centre du Japon autour de Sendai. La résistance remarquable des immeubles secoués durant 2 minutes par ce séisme de magnitude 9 n’a été qu’un élément réducteur de l’amplitude du scénario apocalyptique consécutif au tsunami qui a déferlé et ravagé la cote laissant une impression d’image de fin du monde. Un nouvel Hiroshima, naturel et tout autant cruel, qui frappe les Japonais, avec les conséquences aggravantes de risques de dissémination de radiations nucléaires liées aux immersions des Centrales par le tsunami.
Je pense tristement à Masuko Maeda, à sa famille, ses amis, à tous les Japonais plongés dans un cauchemar horrible, qui ont perdu des proches, de nombreux compatriotes, victimes exposées à des années de difficultés terribles pour sortir d’un tel chaos. Je pense à toi Maeda, à tous les Japonais touchés, meurtris par ce drame immense.
Commentaires